L'enregistreur chauves-souris

Pourquoi étudier les chauves-souris ?

Auxiliaires de culture

Les chauves-souris sont de précieuses alliées contre les ravageurs puisqu'elles peuvent avaler en une nuit plus d'un tiers de leur poids en insectes. Elles sont des prédateurs voraces de plusieurs espèces de papillons nocturnes nuisibles aux cultures tels que la pyrale du maïs, l'eudémis (de la vigne), le carpocapse de la pomme, etc. Elles consomment également différentes espèces de chrysomèles, de scarabées, de mouches, de cicadelles et de punaises.

Selon une étude (Economic importance of bats in agriculture, 2011), en dévorant les parasites qui ravagent les cultures, les chauves-souris permettraient de faire une économie de plus de 1 milliard de dollars à l'agriculture mondiale tous les ans. Elles ont un rôle non négligeable de régulateur des cultures et leur présence a un réel impact sur l'économie agricole.

Indicatrices de la qualité des paysages

Les éléments structurant les paysages agricoles constituent une mosaïque de milieux favorables à la biodiversité et aux chauves-souris. Les chiroptères ont besoin de ces différents milieux qui sont à la fois des terrains de chasse, des routes de vol et des gites.

Les chauves-souris sont donc des espèces indicatrices de la qualité des paysages.

Des études ont montré l'importance des infrastructures agro écologiques pour favoriser leur présence. Les haies, par exemple, leur permettent d'avoir des ressources alimentaires et de les protéger contre les prédateurs.

En déclin et menacées

Parmi les 34 espèces de chauve-souris évaluées en France par l'IUCN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature), six figurent dans la catégorie « vulnérable », une espèce est « en danger », et une autre est classée « en danger critique ».

Attention

Ce protocole n'est pas simple à prendre en main. Il nécessite une bonne connexion internet et il faut s'armer de patience pour envoyer les données.

Le protocole

Quand : 1er juin-15 juillet ET 15 août-30 septembre

Durée : 1 nuit d'enregistrement + temps d'envoi des données (qqs heures)

Fréquence : 2 enregistrements au minimum par an sur la même parcelle

Matériel : enregistreur AudioMoth de LabMaker, câble, pile, carte mémoire, de quoi installer l'enregistreur à 1 mètre du sol, une bonne connexion internet pour l'envoi des données

Condition d'observation : une nuit sans trop de pluie

Ce protocole consiste à enregistrer toute une nuit les ultrasons émis par les chauves-souris. Ce protocole permettra aux chercheurs d'étudier les données enregistrées lors de la chasse nocturne des chauves-souris en lien avec les éléments du paysage et les pratiques culturales.

Après avoir configuré l'enregistreur, il faut le placer toute une nuit au milieu d'une parcelle. L'Audiomoth enregistrera en continue les ultrasons sur toute la nuit. Il faut ensuite récupérer les données de la carte mémoire et les envoyer sur le portail de Vigie-Chiro.

Comme les autres protocoles de l'OAB, il faut renseigner la fiche générale de la parcelle, puis la fiché spécifique. Le protocole étant en phase de test, une partie des données se saisissent su le site internet de l'OAB, et une autre sur le portail de Vigie-Chiro.

Suite à l'envoi de vos données, un fichier CSV vous sera envoyé présentant les indices de probabilité des espèces présentes sur votre parcelle.

Pour en savoir un peu plus sur les chauves-souris

Le terme chiroptère vient de l'étymologie grec chiro-, la main et -ptère, l'aile. Les ailes des chauves-souris se compose d'une fine membrane de peau qui relie les doigts entre eux sauf le pouce qui est libre : on l'appelle le patagium.

Cette membrane souple est parcourue par de nombreux vaisseaux sanguins qui lui permettent notamment de réguler la température du corps. La vitesse moyenne des chauves-souris est de 20 km/h, mais certaines espèces peuvent atteindre jusqu'à 75 km/h.

Ses ailes lui permettent également de capturer ses proies. Le pouce est court et permet de ramper et grimper aux parois. Au repos, les chauves-souris peuvent se suspendre la tête en bas. Les orteils, retournés vers l'arrière, lui permettent de s'accrocher sans trop d'effort grâce à un système de verrouillage mécanique au niveau du tendon du pied.

Alimentation

Il existe près de 1400 espèces dans le monde. En France métropolitaine, il y a 35 espèces réparties dans 4 familles qui se nourrissent exclusivement d'insectes ou d'araignées. Elles trouvent leur proies le long des lisières, dans la végétation, près des points d'eau. Les chauves-souris possèdent différentes techniques pour les attraper qui dépendant de leur espèce et de la taille de proies. Elles peuvent manger près d'1 tiers de leurs poids quotidiennement, c'est pour cela qu'elles sont des alliées des agriculteurs en exerçant une fonction non négligeable d'auxiliaires des cultures (comme par exemple la Pyrale du maïs, le carpocapse de la pomme, l'endemis de la vigne, la mouche de l'olive, la tordeuse orientale du pêcher...)

Remarques : La Grande noctule peut exceptionnellement capturer des petits oiseaux... Les Murins de Daubenton et de Capaccini peuvent aussi se nourrir de petits poissons

L'echolocation

Pour se déplacer et localiser leurs proies, les chauves-souris émettent des ultrasons avec le larynx et les analyses avec leur système auditif. Ces petits sons très brefs sont des ultrasons qui sont inaudibles pour l'Homme. Les ultrasons rebondissent comme des ricochets sur les obstacles et leur sont renvoyés aux oreilles, permettant ainsi aux chauves-souris de se repérer et d'identifier les objets qui les entoure (taille, vitesse, forme) : on appelle cela l'écholocation. Chaque espèce à une fréquence, un rythme et une puissance caractéristique. La noctule peut émettre jusqu'à 150 m.

La fréquence correspond au nombre de signaux par seconde dans l'air, elle est exprimée en Hertz (Hz). Pour identifier une espèce on analyse ces ultrasons à l'aide d'un sonogramme. On s'intéressera également à l'amplitude du signal, sa durée, son intensité, sa structure et son rythme qui seront autant d'informations pour mieux comprendre l'activité des chauves-souris.

Pour info !

Émissions vocales chez l'Homme : de 60 Hz à 12 kHz, Oreille sensible : de 18 Hz à 18 kHz

Émissions sonar de 8 à 20 kHz

PipistrellesInformations[1]

Cycle de vie

Elles utilisent une grande diversité d'habitats en fonction de là où elles chassent, ou elles gîtent... Selon les espèces les gites peuvent être cavernicoles, arboricole ou anthropophiles.

Le transit printanier

Les insectes réapparaissent, les chauves-souris peuvent reprendre des forces. C'est le moment de la seconde phase de la reproduction : la fécondation. La gestation peut durer de 40 à 70 jours selon les espèces. Généralement, les femelles ne mettent au monde qu'un seul jeune par an. Les femelles vont alors rechercher des gîtes de mises bas.

Estivation

Les jeunes seront élevés en nurserie dans un gîte calme et chaud, avec une zone de chasse à proximité. Pour garder de la chaleur, les chauves-souris se regroupent alors en colonies. C'est une période d'activité intense pour les chauves-souris. Les jeunes sont allaités pendant 4 à 5 semaines jusqu'à leur taille adulte où ils ont appris à voler et à chasser les insectes. C'est à ce moment-là que les chauves-souris décident alors de changer de gîtes.

Transit automnal

Les mâles et les femelles se retrouvent dans des gîtes de transition. Certaines espèces vont se retrouver dans des sites de swarming : ce sont des grands rassemblements ou plusieurs espèces se retrouvent favorisant ainsi le brassage génétique lors de l'accouplement. Les femelles ont alors recours à l'ovulation différée : elles stockent le sperme dans leur appareil génital pendant tout l'hiver.

La phase d'hibernation : de mi-novembre à début mars

Les insectes se font de plus en plus rares, les chauves-souris cherchent des gîtes ou elles passeront l'hiver. Le gîte doit être frais (entre 0°C et 10°C) et humide pour éviter que leurs ailes se dessèchent. Leur battement de cœur est alors très lent (10 battements par minutes) et leur respiration est faible.

Ce schéma a été réalisé par le conservatoire d'espace naturel de Nouvelle Aquitaine :

Les menaces

L'ONB a montré un déclin des espèces de 40 % les 10 dernières années. Ces résultats se sont basés sur les données issues du programme de science participative Vigie-Chiro. Plusieurs pressions sont exercées sur les chauves-souris : la perte des habitats, les collisions avec les routes et les éoliennes, la prédation, les pesticides...

Les statuts de protection

En France, toutes les espèces sont protégées depuis 1976 (Code de l'Environnement et AM avril 2007)

En Europe :

- Directive Habitat Faune Flore

- Accord Eurobats

Au niveau international : Convention de Bonn (1990) et Convention de Berne (1996)

Quelques tendances issues des données de Vigie-Chiro

L'Observatoire Nationale de la Biodiversité s'appuie sur les indicateurs produits grâce aux observations du programme nationale de sciences participatives de Vigie-Chiro. Pour rappel, le protocole chiroptère de l'OAB s'est appuyé sur le protocole point fixe de Vigie-Chiro.

Le bilan 2018 de l'Observatoire National de la Biodiversité (ONB) montre que les populations de chauves-souris ont diminués de 38% en 10 ans.

Favoriser la présence des chauves-souris

La Chambre d'agriculture du Tarn a réalisé un Guide pour les paysages propices aux chauves-souris.

ComplémentPour aller plus loin

- Tanguy Stoecklé a mis en ligne en accès libre son impressionnant film documentaire "Une vie de grand Rhinolphe" (48 '). Ce film nous invite à suivre cette espèce étonnante à travers une jeune femelle et sa mère issues d'une grande colonie en Camargue.

- Un article du blog Vigie-Nature "Les chauves-souris, anges gardiens des forêts et des parcelles cultivées" qui propose une sélection d'articles scientifiques sur les chauves-souris en milieu agricole.

- Le site internet du Plan National d'Actions des chiroptères, qui recense plusieurs informations relatives aux chauves-souris : événements, acteurs, actions...

ExempleLien avec l'enseignement agricole

Ce protocole est en phase de test et a été initié suite à une demande des participants de l'OAB. Plusieurs études scientifiques ont en effet montré que les chauves-souris sont d'excellents auxiliaires de culture ; il y a donc un véritable enjeu pour la transition agro-écologique. En étudiant et en comprenant le fonctionnement des agro-systèmes, on peut interroger les pratiques agricoles et développer les infrastructures agro-écologiques pour favoriser la présence des chauves-souris.

En 2019, une dizaine d'établissement d'enseignement agricole se sont positionnés pour participer à la phase test de ce protocole. Ce protocole intéresse particulièrement les filières Nature : Le protocole point fixe de Vigie-Chiro s'adresse initialement à des naturalistes. Ceux-ci pourront étudier les sonogrammes afin d'identifier les chauves-souris présentes et comprendre leurs activités.

Les services écosystémiques apportés par les chauves-souris intéresseront les filières agricoles. Ce protocole permettra d'interroger les éléments du paysage. Les apprenants pourront proposer des actions à réaliser pour favoriser la présence des chauves-souris sur l'exploitation.